Troïaka, un village russe comme un autre. Un enfant y passe ses vacances avec Nastia, sa nounou. Il y a la beauté de la nature de la Russie centrale, l'étang, les promenades, les jeux simples... Ici un cheval, là un chat ou un chien. Des isbas. Une ambiance très tchékhovienne, à ceci près que nous sommes en URSS dans les années 1960-1970. Nastia relève de trois genres littéraires, tout en restant inclassable.
Il s'agit tout d'abord d'esquisses d'une vie rurale qui semble d'autant plus suspendue dans le temps qu'elle n'existe plus aujourd'hui : les villageois sont morts ou ont gagné les villes, les maisons sont en ruine. Le mode de vie paysan qui, jusqu'aux années Khrouchtchev, avait survécu par une sorte de miracle à toutes les guerres, révolutions et autres collectivisations, est moribond. Nastia est ensuite un livre de mémoire.
Mémoire d'une enfance déjà lointaine. Mémoire d'un lieu englouti, telle une Atlantide, avec les êtres qui le peuplaient. Andreï Alexandrov a gardé le souvenir de chaque maison, de chaque personne, ressuscitées dans le texte et les pastels qui l'accompagnent. Enfin, Nastia est un portrait magnifique, comme on n'en trouve que dans la littérature russe classique : un portrait de nounou - une tradition depuis Pouchkine -, femme irremplaçable, à la beauté simple et pure.