L'individu " animé d'un immense amour-propre ", dont le but est d'" atteindre la perfection et le succès dans toutes les entre-prises, et d'obtenir ainsi l'admiration et les louanges de son entourage", cet individu-là, brusquement contrarié dans son élan par un détail qui l'insupporte, peut-il, tournant le dos au monde, se consacrer à Dieu ? Ou bien, pour être plus précis : si la décision d'un tel être se trouve motivée par le désir de montrer à tous son mépris, se peut-il que, libérant alors une religiosité jusque-là étouffée par son orgueil, il se délivre de la pesanteur grâce à la soumission aux règles monastiques et ascétiques ? Telle est, brièvement exposée, la problématique du Père Serge. Cette nouvelle qui, pour être souvent passée inaperçue dans l'oeuvre de Tolstoï, n'en constitue pas moins, en même temps que son écrit le plus serré, le plus fondamental, une parabole à la fois violente, sobre et universelle digne de prendre place parmi les grands témoignages spirituels.