De Boris Godounov à Guerre et Paix, écrivains et musiciens ont illustré le long destin tragique du peuple russe. Après avoir porté tous les espoirs en la démocratie, le progrès et la modernité, le XXe siècle fut très vite celui de tous les malheurs, cumulant guerres et révolutions, pénurie et émigration, censure et oppression. Au même moment, la musique russe connaissait paradoxalement un essor extraordinaire, portée par ses trois plus grands noms ? Rachmaninov, Stravinsky et Prokofiev ? dans une émigration qu?ils pensaient de courte durée, mais les années passèrent et la musique changea de sens, quittant sa russéité chez Stravinsky, en cherchant un autre, prolétarien d?abord, réaliste et socialiste ensuite chez les musiciens restés en Union soviétique. La valeur de la musique devint celle de son service à l?idéologie et son prix, celui de Staline. Seul Prokofiev pensa qu?un compromis était possible. Le « fils prodigue » revint et ce fut un désastre.